Qualité de vie au Travail

Interviews managers : les 1ères leçons de la crise

5 minutes
Après avoir vécu un printemps pas comme les autres, 3 managers témoignent de leur quotidien pendant cette période de crise sanitaire. Certains ont été confinés et ont travaillé à distance. D’autres ont assuré le bon fonctionnement de l’activité en se rendant sur site.

Nous sommes allés à la rencontre d’Estelle (responsable d’un réseau de Vente à Distance), de Nadine (responsable des contenus au sein du Marketing) et de Jean Luc (responsable gestion des flux numériques au sein de la Relation Clients).

Pendant la période de confinement comment avez-vous organisé votre activité et celle de votre équipe ?

 J-L : Nous avons une activité qui ne peut pas se faire à distance, j’ai donc travaillé sur site pendant toute cette période de confinement avec un tiers de mon équipe gestionnaire polyvalent. L’organisation des deux premières semaines a été un peu chaotique. En effet, notre activité de traitement du courrier dépend de l’activité de la poste et il est arrivé que nous ne puissions plus maitriser la quantité de courrier à traiter car nous recevions de gros volumes très irrégulièrement.

Mes collaborateurs et moi-même appréhendions la suite des évènements avec pour certains une crainte d’attraper le virus, et pour d’autres le sentiment d’insécurité avec un rythme de travail saccadé.

Néanmoins, l’équipe est restée soudée et de beaux moments d’échanges et de complicité se sont créés.

N : Du jour au lendemain, nous avons demandé à l’intégralité de l’équipe de passer en télétravail. Cette pratique était déjà largement déployée dans l’équipe avec 1 jour de télétravail par semaine pour une grande majorité. Les collaborateurs étaient donc déjà expérimentés et autonomes dans le travail à distance, et maitrisaient les outils collaboratifs.

La difficulté a plutôt été liée à l’urgence de la réorganisation du suivi, à la mesure d’activité et au déploiement « technique » du télétravail à temps plein.

Les 2 premières semaines ont été marquées par des difficultés d’accès à certains matériels pour des personnes non équipées, comme les difficultés de connexion.

Le véritable bouleversement lié au télétravail a été vécu dans nos modes de fonctionnement. Nous sommes passés d’un travail en équipe très collaboratif, « en direct live » et convivial à un travail à distance qui a nécessité de revoir nos pratiques et outils de suivi d’activité. Tout ça dans un temps minimum et un contexte particulièrement anxiogène !

E : Dès le 17 mars, l’équipe et moi-même avons télétravaillé. Les activités de vente à distance ont été entièrement réalisées en télétravail.

La participation aux ateliers et à certaines réunions n’ont pas pu être assurées à distance mais sinon tout le reste de mon activité et celle de l’équipe ont pu être réalisé « à la maison ».

Depuis le 18 mai, seule une partie des collaborateurs et moi-même sommes à nouveau présents sur site quelques jours par semaine.

Avez-vous modifié et/ou gardé votre méthode de suivi d’activité de votre équipe ? Vous-êtes-vous senti à l’aise avec ce nouveau fonctionnement le cas échéant ?

J-L : Nous avons maintenu le suivi d’activité en le modifiant pour s’adapter au contexte. Un tiers a été consacré au traitement des courriers postaux et deux tiers en traitement dématérialisé dont une partie des flux a permis de soulager la charge de travail et de faciliter l’accès aux documents aux différents services d’APICIL (action sociale, santé-prévoyance, épargne, ressources humaines).

Notre principale inquiétude était de se retrouver sans activité. Pour les collaborateurs sur site, il y a eu une vraie solidarité.

N : Nos activités étant très interdépendantes, nous avons l’habitude de travailler collégialement, en mode collaboratif, dans des espaces partagés avec kanbans et de nombreuses interactions au quotidien.

Bien évidemment, tout cela a été obsolète du jour au lendemain.

Il a fallu réinventer un mode de suivi, pour que chacun soit au courant de l’avancée des travaux des autres, faciliter la collaboration à distance, rendre compte et identifier des difficultés rencontrées. Les managers ont dû évaluer quotidiennement la charge pour évaluer un éventuel recours au chômage partiel.

Nous sommes donc passé en mode « stand-up téléphonique », avec des points via Skype.  Au début, nous nous connections tous les jours et après environ 1 mois, le fonctionnement étant rodé, nous sommes passés à 2 stand-up téléphoniques par semaine.

Nous avons bien évidemment maintenu les réunions d’équipes mensuelles, qui ont donné lieu à des échanges plus qualitatifs, sur des sujets transverses, les difficultés rencontrées sur les périodes précédentes.

E : Il n’y a pas eu de modifications majeures sur la méthode de suivi d’activité hormis pour moi qui passe désormais beaucoup de temps au téléphone et sur les applications !

Au départ, j’ai ressenti beaucoup de fatigue car déployer le télétravail à distance avec 18 personnes n’a pas été de tout repos. Heureusement, j’ai pu compter sur le soutien de ma hiérarchie et sur la mobilisation de  mon équipe. Les collaborateurs sont au top ! Cela m’a beaucoup rassurée de voir à quel point ils sont impliqués et bien organisés. Il y a eu encore plus de solidarité et de bienveillance.

Comment avez-vous organisé et réalisé vos réunions d’équipe, vos points individuels ? A quels outils avez-vous eu recours et quel retour d’expérience pouvez-vous en faire ?

J-L : Comme à notre habitude, nous avons gardé nos briefs d’une durée de dix à quinze minutes, suivant les sujets, chaque matin afin de répartir l’activité courante ainsi que nos actions ponctuelles. Étant sur site, nous faisions nos réunions sur le plateau en nombre réduit et en respectant les gestes barrières et la distance.

N : Pour les stand-up téléphoniques, les réunions d’équipe ou les réunions de travail, les outils Teams, Skype voire Whatsapp ont été très sollicités, avec plus ou moins de bonheur selon les jours et les participants ! Nous n’avons quasiment pas utilisé la vidéo. Pour garder le lien, prendre des nouvelles et mesurer le moral, l’outil préféré est resté  le micro lors de nos échanges avec ces différents outils. A noter d’ailleurs que les réunions à distance 5 jours sur 5 parfois toute la journée sont épuisantes car elles demandent une attention constante, des règles d’écoute et d’intervention pour ne pas se couper, se comprendre

E : Nous n’avons pas pu réaliser de réunions d’équipe pour ma part, c’est ma grande déception. En effet entre les problèmes de microphone, de haut-parleur, de réseau insuffisant j’ai abandonné après quelques tentatives.

Néanmoins, chaque matin pour donner de la visibilité aux collaborateurs je leur envoie par mail les statistiques de la veille et ils sont informés des volumes traités et des informations importantes au jour le jour.

Le suivi individuel se fait par téléphone. J’envoie soit au préalable les supports soit on les partage via les applications et on les commente ensemble

Quels ont été les moyens mis en place pour maintenir du lien avec votre équipe (professionnel et/ou autre) ? Et pour favoriser le lien entre collaborateurs ?

J-L : Pour le tiers de l’équipe qui était sur site, il y a eu une réelle cohésion et une bienveillance dans nos relations qui s’est créée et pour le reste de l’équipe, j’ai gardé le lien par message et courriel pour les tenir informés des évolutions professionnelles mais également pour prendre des nouvelles personnelles.

En somme, nos liens sociaux se sont renforcés « grâce » à cette période de crise avec la naissance d’une solidarité. Ils nous arrivaient de faire les courses pour certains, de donner des masques, d’acheter des lingettes, du gel hydroalcoolique et tout ce dont nous avions besoin.

N : Au-delà des stand-up téléphonique, des réunions et des points personnels d’activité, nous avons mis en place une météo journalière avec une petite phrase de commentaire demandée à chacun de manière anonyme pour mesurer l’état d’esprit général du service. Globalement, la tendance a toujours été au positif, avec une moyenne en général autour de 3,5 étoiles sur 4.

Les commentaires étaient souvent drôles et nous en ferons certainement un bon usage quand nous rentrerons tous sur site !

Une collaboratrice nous envoyait quotidiennement la phrase du jour qui était toujours positive, entre philosophie et bien-être personnel…

Nous avons même réussi à faire un « apérotime d’au revoir » pour Marie, qui a quitté le Groupe pendant la période. Un joli moment de partage et d’émotion, malgré la distance

E : Pour remplacer la « machine à café », nous avons créé un groupe Whatsapp sur lequel nous bavardons, nous nous disons “bonjour” le matin…, quand nous partons en pause…, quand nous rencontrons des problèmes techniques…. Depuis peu, nous avons recours à Teams pour toucher un plus large public au sein de l”équipe.

Selon vous, en quoi cette organisation mise en place dans ce contexte COVID pourrait impacter votre fonctionnement et vos méthodes de travail de demain ?

J-L : Nous avons dû modifier le traitement de nos activités et accentuer le traitement du courrier de façon dématérialisée. Cette option nous obligeait à être présents sur site et a mis en avant que notre activité en présentiel est primordiale.

Par conséquent, il est probable que nous revoyons nos méthodes de travail pour former les collaborateurs à d’autres métiers. L’objectif est de ne pas pénaliser les collaborateurs qui travaillent uniquement sur une expertise. Ceux-ci avaient été contraints de cesser leur activité durant la crise.

N : La réunion d’équipe de mai a donné lieu à une rétrospective de la période : une analyse des ressentis, la projection de la période de confinement/déconfinement sur la base d’un jeu de portrait chinois et un recensement des nouvelles pratiques découvertes durant le travail à distance.

Au-delà de l’aspect ludique, ce temps d’échange a permis de plébisciter un mode de travail mixte partagé sur la semaine : le traitement et le suivi de certains dossiers opérationnels sont facilités en face à face sur site, alors que le télétravail est propice pour avancer plus rapidement sur les sujets qui demandent de la concentration et du calme.

Les 2 modes de travail sont complémentaires et leur combinaison renforce l’efficacité de l’équipe.

Par ailleurs, nous avons découvert ou redécouvert des pratiques d’organisation  :

  • Les « to do list » et mémo personnels sur papier pour ne rien oublier dans une période où la densité des informations étaient particulièrement intense,
  • Les comptes-rendus hebdomadaires écrits et non plus affichés sur des panneaux,
  • Un récapitulatif d’activité par personne et non par sujet, plus rapide et plus concis.

A ce jour, nous avons prévu de poursuivre les travaux du « portrait chinois » pour construire ensemble nos stand up de retour sur site. Nous savons déjà qu’ils doivent évoluer pour conserver leur dynamisme et fixer ensemble le nouveau cap. Nous analyserons aussi sans doute plus largement les facteurs clés de succès de la période afin de les conserver.

E : Cela m’a permis d’identifier les activités qui pouvaient être télétravaillées. Le télétravail est avant tout une méthode avec son organisation et son animation. Il faut de bons outils pour que cela fonctionne bien !

Aujourd’hui à l’heure du déconfinement avez-vous des attentes en termes d’accompagnement (RH, formation, autre …) ?

J-L : Je n’ai pas particulièrement d’attentes en termes d’accompagnement. Il est vrai que je suis conforté dans l’idée que la polyvalence des salariés est la clef de la réussite. Former nos collaborateurs sur d’autres activités permettrait qu’ils soient opérationnels dans toutes les situations.

N : Nous avons besoin et envie de nous retrouver, de prendre le temps de partager en face à face. Nous aurions aussi besoin d’outils d’animation à distance pour mesurer et stimuler le moral des équipes.

E : Des attentes oui, surtout en matière d’équipements.

La priorité doit être d’équiper les salariés avec du matériel informatique performant (PC avec microphones, téléphone, casque) car il y a trop de disparités. De là naissent les difficultés à organiser des réunions à distance, à partager des moments.

Pouvez-vous nous citer un titre de film qui résumerait pour vous cette période ?

J-L : Il y a deux films qui me font penser au confinement sur site. Le premier serait « Seul au monde » avec l’acteur Tom Hanks (surtout les deux premières semaines où je me suis senti bien seul avec mon équipe) et le deuxième serait « Je suis une légende » avec Will Smith pour le côté désertique des locaux.

Pour le déconfinement, ce n’est pas un film mais un dessin animé « Fourmiz », qui me fait penser au retour des collègues sur site et la reprise d’une vie comme avant cette crise.

N : Un film qui reflète le confinement serait “Le Bonheur est dans le Pré” et pour le déconfinement, “La Grande Vadrouille”.

Je peux aussi citer pour d’autres membres dans l’équipe : « Seul au Monde » ou « Out of Africa » pour le confinement et « 28 semaines plus tard » ou « Le Sens de la Fête » pour le déconfinement.

Nous en ferons peut-être un panneau « ciné » 😉

E : Le film « Seul au monde »  me fait penser au confinement par son histoire et je pensais à « 28 semaines plus tard » pour le déconfinement.

Y a-t-il un autre sujet sur lequel vous souhaitez vous exprimer ?

J-L : Je tiens à féliciter mon équipe et tout particulièrement ceux qui ont pu venir sur site durant cette période compliquée, malgré leurs craintes et leurs peurs face au virus. Ils ont su répondre présent en se montrant solidaires et avec un esprit d’équipe irréprochable.

N : Avant le confinement, nous étions déjà très proches, avec des visions et des valeurs partagées. Notre mode de travail était hyper collaboratif. Le confinement aurait pu perturber notre travail, nous éloigner, d’autant que nous ne l’avons pas tous vécu de la même façon.  En réalité, les liens de l’équipe se sont renforcés, tout comme l’entraide et la solidarité. Plus spécifiquement, l’attention à l’autre, malgré la distance, ou grâce à la distance, est devenu plus importante.

Alors, un grand bravo et merci à l’équipe et au département !

E : Je remercie l’ensemble de mon équipe pour la poursuite de l’activité et leur capacité d’adaptation face à la situation. En effet, du jour au lendemain, nous avons travaillé à distance en télétravail et continuer nos activités. Tout le monde a su être opérationnel et coordonné. Je les remercie d’avoir joué le jeu et d’avoir été aussi efficace.