Comment est venue cette passion pour la navigation et l’envie de devenir marin ?
J’ai commencé la voile à l’âge de 10 ans et mon parcours sportif est assez particulier : j’ai énormément navigué sur tous les types de supports qui existent. Avec une évolution progressive et linéaire, je suis passé en Imoca depuis 2018, des bateaux de plus de 18 m.
L’envie d’être marin c’est depuis tout petit. Elle s’est construite au fur et à mesure mais l’élément déclencheur a été à l’âge de 10 ans avec l’arrivée de la Route du Rhum en Guadeloupe. À l’époque c’était Florence Arthaud qui avait gagné, une grande inspiration.
En tant que chef d’entreprise, comment arrivez-vous à trouver un équilibre vie professionnelle/vie personnelle ?
C’est un équilibre à trouver qui n’est pas évident au début. Il faut avoir des objectifs clairs et précis sur le plan professionnel, sinon ça peut être très chronophage et venir empiéter sur la vie personnelle.
Il est important d’avoir des personnes ressources autour de soi pour structurer son environnement professionnel et de fixer certaines limites.
Dans mon cas, il est stratégique de bien séparer les objectifs de performance sportive et les objectifs de performance liée à ma société. Pour pouvoir être performant dans le domaine sportif, il a fallu que je sois performant dans le domaine entrepreneurial. Il faut que ce soit solide autour de moi, avec des personnes sur lesquelles je puisse m’appuyer; et une fois que c’est sécurisé de ce côté-là, je peux avoir l’esprit libre sur la performance sportive.
Comment arrivez-vous à jongler entre le statut de marin et chef d’entreprise ?
En tant que marin et chef d’entreprise, il ne faut pas que j’oublie mon rôle de décisionnaire.
Quand il y a une prise de de décision à faire sur le bateau, même si je consulte mes équipiers qui sont parfois plus experts que moi dans un domaine précis, la personne qui prend les décisions à la fin c’est bien moi. L’ordre est établi de cette manière-là. Il faut savoir mettre la barrière entre mon statut de skippeur et celui de chef d’entreprise, un exercice qu’on doit maitriser si l’on ne veut pas être dépassé.
Avez-vous des techniques pour préparer votre mental avant une compétition ?
J’ai essayé beaucoup de choses mais ce que je retiens aujourd’hui, c’est la démarche du sportif qui doit être sincère. L’envie et la motivation doivent venir de la personne elle-même, ça c’est la première clé.
J’ai eu plusieurs phases dans ma carrière mais au fil du temps j’ai construit ma propre méthode en puisant dans différentes techniques et j’ai trouvé celle qui me correspondait le mieux.
L’imagerie mentale, dans les moments hors courses pour préparer un événement, des techniques de relaxation pour ne pas être stressé la veille ou quelques minutes avant une compétition.
Encore aujourd’hui je fais appel à des personnes ressources en qui j’ai confiance. Il y a une personne qui m’a beaucoup aidé notamment sur le départ du Vendée Globe, qui est à la fois mon kiné et mon préparateur mental, aussi bien sur le plan physique que dans la gestion des émotions.
Quel type de manager êtes-vous ?
Je me qualifierais comme un manager participatif et délégatif.
Des fois je dois forcer ma nature dans l’aspect décisionnel. Quand je suis chef d’entreprise et skippeur, il y a certain choix très forts qu’il faut faire et je dois être en capacité aussi bien de les affirmer que de les assumer.
On ne naît pas chef d’entreprise, on le devient. On peut faire jouer ses qualités intrinsèques. Il n’y a pas de profil type mais on peut acquérir des compétences au fil du temps. Il faut savoir bien s’entourer et forcer sa nature pour assurer son statut.
Comment réussissez-vous à motiver votre équipe tout au long de l’année ?
Lorsqu’on a un rythme soutenu comme pour la préparation du Vendée Globe, de part les contraintes sanitaires liées au Covid-19, il faut réussir à être attentif à la pression de son équipe et être à l’écoute. De plus, il est de mon devoir de ménager mes coéquipiers, de comprendre les problématiques de chacun afin de pouvoir réagir et anticiper les soucis avant que ça prenne plus d’ampleur.
Toujours garder les objectifs en ligne de mire et savoir féliciter au bon moment ses salariés.
Être un sportif de haut niveau n’est pas sans risque, comment faites-vous pour vous protéger vous, votre famille et votre activité entrepreneuriale ?
Le sport de haut niveau c’est génial quand on a la possibilité d’y accéder, mais ça peut s’arrêter du jour au lendemain à cause d’une blessure ou autre.
“Dans le mot prévoyance il y a le mot prévoyant et il faut construire ces choses-là autour de nous.”
Pour construire des projets solides, j’ai eu la chance d’être bien accompagné, que ce soit par mes entraineurs mais aussi ma femme, Tifenn Seguin, qui fait partie intégrante de l’activité.
En tant que chef d’entreprise et ambassadeur sur les océans du groupe APICIL, je me dois d’offrir à mes salariés une protection sociale.
Bien sûr, il y a une barrière entre ce qu’il est conseillé de mettre en place pour mes salariés ou TNS et ce que moi je vis en tant que sportif de haut niveau. Ce sont deux choses complètement différentes. En tous cas, si jamais ça devait se passer mal, il faut prévoir les choses au niveau de la protection sociale, pour ma femme et mes enfants.