Réglementaire

Loi travail : le gouvernement a (en partie) séduit les DRH

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Comment les DRH perçoivent le contenu des ordonnances présentés fin août par le gouvernement ? L’ANDRH s’est intéressée à la question via un sondage flash.

Après avoir pris le pouls des DRH en mai-juin dernier via une première enquête, l’association nationale des DRH a complété cette consultation d’un second sondage flash.

Pour rappel, les premiers résultats avaient été recueillis auprès de 568 DRH, entre le 17 mai et le 5 juin dernier. Les 5 000 adhérents à l’ANDRH ont de nouveau été interrogés entre les 14 au 19 septembre dernier, peu de temps après la promulgation des cinq ordonnances présentées par le gouvernement.

 

Dans l’ensemble, des DRH convaincus

Globalement, les directrices et directeurs des ressources humaines des PME, ETI et grands groupes qui forment la plupart des adhérents de l’ANDRH semblent satisfaits du fond comme de la forme.

Des résultats qui font des DRH de véritables porte-parole de la réforme. « Les ordonnances ont été rédigées dans l’écoute de tous, sans compromis ni fourre-tout inapplicable, » a expliqué Jean-Luc Bérard, directeur des ressources humaines du groupe Safran, aux Echos. « Muriel Pénicaud et son équipe ont fait preuve d’un savoir-faire évident. La seule incertitude que nous pouvions avoir concernait la manière dont la concertation allait se passer. Et ça s’est très bien passé. », a-t-il poursuivi.

Un véritable plaidoyer pour des mesures qui vont permettre de « Rénover, fluidifier, mais surtout simplifier ».

 

Une Ministre du Travail ex-DRH

Muriel Pénicaud, actuelle Ministre du Travail, fut DRH du groupe Danone. Une expérience qui lui confère une certaine légitimité quant aux problématiques des directrices et directeurs des ressources humaines. Est-ce suffisant pour expliquer le satisfecit de la profession ? Sans doute pas.

En réalité, les acteurs du domaine réalisent un lobbying de fond depuis des années, par la voie notamment de l’ANDRH.

Des DRH influents ont ainsi pesé de tout leur poids sur cette réforme. « L’ANDRH avait pris position en faveur de la fusion des instances représentatives du personnel dès 2011 », rappelle Jean-Christophe Sciberras, à l’époque président de l’association, toujours dans Les Echos. « Renvoyer les négociations vers les entreprises, regrouper les instances représentatives du personnel, renforcer la flexisécurité font partie des idées prônées depuis longtemps par l’ANDRH ».

Et cette influence n’a a trouvé une oreille attentive au ministère du Travail. Mieux, tous les DRH de grands groupes interrogés par Les Echos reconnaissent avoir été consultés de près ou de loin par l’exécutif français.

L’ANDRH avait pris position en faveur de la fusion des instances représentatives du personnel dès 2011. Renvoyer les négociations vers les entreprises, regrouper les instances représentatives du personnel, renforcer la flexisécurité font partie des idées prônées depuis longtemps par l’ANDRH

Jean-Christophe Sciberras

ex-Président de l’ANDRH et DRH de Solvay France

 

Un enthousiasme teinté de réserves

Impossible toutefois de parler de réforme faite pour et par les DRH. Car il reste des points de friction sur lesquels l’ANDRH précise vouloir appliquer une vigilance toute particulière.

Il s’agit notamment de la fusion des instances représentatives du personnel, qui ne doit pas être une simple juxtaposition des CHSCT et CE, mais conduire à une refonte plus importante visant à améliorer l’efficacité du dialogue social.

Concernant le plafonnement des indemnisations prudhommales, les DRH ne sont pas favorables au barème évoqué dans les ordonnances, et préfèrent un plafond pour sécuriser les entreprises et d’un plancher pour assurer la protection des salariés. L’idée étant de laisser aux juges la possibilité d’apprécier les situations au cas par cas.

La rupture conventionnelle collective, quant à elle, ne recueille que 53% d’opinion favorable. Pire, le chèque syndical ou la possibilité pour une organisation syndicale représentative de nommer un délégué syndical qui ne s’était pas porté candidat aux élections professionnelles rencontrent une hostilité certaine de la part des DRH (71% et 77% d’opinion défavorable).

Quoi qu’il en soit, et comme le résume le président du Cercle des DRH européens, Yves Barou : « Ce n’est pas la loi qui fait le dialogue social. Encore faut-il que les acteurs en aient envie. »

Quelques chiffres

  • Le recours aux ordonnances est approuvé par 79% des DRH ayant répondu à l’enquête ;
  • La réduction du nombre de branches est plébiscitée (87% de répondants favorables) ;
  • La recomposition du Code du Travail en trois parties fait quasiment l’unanimité (91%) ;
  • Idem pour la possibilité d’organiser un référendum pour valider un accord d’entreprise (92%) ;
  • 88% des répondants sont également favorables à la fusion des instances représentantes du personnel ;
  • L’assouplissement des modalités de recours au CDD recueille 85% d’opinion favorable ;
  • Le modèle de lettre de licenciement est une idée approuvée par 68% des DRH ayant participé à l’enquête ;
  • 74% d’entre eux sont d’accord avec la mise en place d’un plafonnement des dommages et intérêts en cas de licenciement « sans cause réelle et sérieuse ».