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Quand la science cherche les clés du bonheur

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Existe-t-il une recette pour être heureux ? Depuis des décennies, les chercheurs tentent de découvrir les secrets du bonheur. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ce n’est pas simple…

Le bonheur peut apparaître pour certains comme un concept, une notion d’ordre philosophique à laquelle la science n’a pas accès. Pourtant, des chercheurs du monde entier se penchent sur ce sujet depuis de nombreuses années, multipliant des conclusions parfois remises en question.

Actuellement, les chercheurs s’accordent sur un chiffre, ou plutôt trois chiffres : 50, 40 et 10%. Selon eux, 50% de notre bonheur s’explique par la génétique, 40% viennent de notre cerveau (qui enregistre nos choix de vie, nos engagements, les rencontres que l’on va faire…), et seulement 10% trouvent leurs sources dans des causes extérieures (pays de naissance, le milieu social de la famille, etc.)

A la recherche du bonheur

Forts de ce constat, les scientifiques ont cherché à identifier les facteurs capables de nous rendre heureux.

Au mois de mars dernier, une équipe de scientifiques de la très sérieuse University of Southern California (Los Angeles) a publié un article dans lequel elle explique avoir étudié plus de 8 000 personnes durant 15 ans.

Aujourd’hui âgées de 50 à 60 ans, les sujets les plus « heureux » ont fait preuve d’au moins 4 des 5 qualités humaines suivantes : détermination, sens du contrôle, optimisme, stabilité émotionnelle et de conscience.

Ce « cocktail de qualités » permettrait de vivre en meilleure santé, avec un cercle social élargi et même… plus riche.

Nous reviendrons plus loin sur le lien entre richesse et bonheur. En revanche, une gigantesque étude, dont les résultats ont été dévoilés en 2015, a tenté de montrer l’importance de la qualité des relations sociales dans l’accession au bonheur.

Durant 75 ans, 724 hommes ont été interrogés par la chaire sur le développement de l’adulte de la prestigieuse université de Harvard. Les scientifiques les ont questionnés à intervalles réguliers sur leur travail, leur famille, leur santé. Analyse de sang, scanners du cerveau et même autopsies pour les participants décédés ont permis d’apporter des éléments indépendants du ressenti des sujets.

Résultat presque sans surprise : les relations humaines sont excellentes pour le bien-être et la santé, tandis que la solitude affaiblit et abaisse l’âge de la mort.

Et si vous regrettez que cette étude n’ait concerné que des hommes, rassurez-vous : les scientifiques ont entrepris un travail similaire sur les enfants des premiers candidats, filles comme garçons cette fois !

Des certitudes qui flanchent

Ces études sont deux exemples parmi de très nombreux autres des tentatives de la science de découvrir les clés du bonheur. Mais comme souvent, certaines conclusions se contredisent.

Ce fut le cas tout dernièrement à propos de la fameuse corrélation entre le sourire et le bonheur.

En 1988, des chercheurs avaient établi que le fait de sourire pouvait influencer notre humeur. Oui, mais voilà qu’une autre équipe a tenté de reproduire l’expérience, pour valider les résultats. Sans y parvenir.

1 894 étudiants (soit presque 20 fois plus que lors de l’expérience originale), répartis dans 17 laboratoires, se sont soumis au protocole établi il y a presque 30 ans. Les résultats sont très différents, et s’ils ne montrent pas que le sourire n’a pas d’influence sur l’humeur, ils disent en revanche que l’inverse est plus difficile à affirmer que prévu. Jusqu’au jour où l’on montrera que cette contre-étude comportait elle-même des biais…

L’argent ne fait pas le bonheur. A moins que…

Le fameux adage affirmant que l’argent ne fait pas le bonheur est un parfait exemple des difficultés rencontrées par la science dans sa quête des clés du bonheur. Depuis longtemps, les scientifiques cherchent à la confirmer, ou au contraire à l’infirmer. Sans y parvenir réellement.

Remontons seulement jusqu’au début de cette décennie. Août 2010, des chercheurs de Princeton University, aux États-Unis, affirment dans une publication du journal scientifique PNAS que le bonheur ne croît plus au-delà de 4 900 euros mensuels. Cette idée d’un revenu seuil, connu sous le nom de « paradoxe Easterlin », a perduré durant des années, soutenue par les Prix Nobel d’économie Daniel Kahneman (2002) et Angus Deaton (2015).

Elle est aujourd’hui remise en question par d’autres scientifiques, qui affirment que le lien entre argent et bonheur ne rompt pas après ce fameux seuil. D’autres études, dont une enquête sur le bonheur et l’argent réalisée en 2007 par Ipsos, minimisent quant à elles l’influence de l’argent dans le bien-être.

Ces nombreuses contradictions ont deux origines. Les scientifiques ne cherchent tout d’abord à mesurer que des facteurs qui participent, selon eux, au bonheur, et non le bonheur lui-même, qui n’est pas quantifiable directement. Ces études, ensuite, considèrent ces facteurs de manière souvent isolée. Le bonheur, cette notion si complexe, reste décidément bien difficile à évaluer pour la science.